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RADIO TANKONNON

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A Ouagadougou, des milliers de Burkinabè marchent contre des assassinats ayant ciblé les Peulh à Yirgou

Publié par SAIDICUS LEBERGER sur 12 Janvier 2019, 18:23pm

Catégories : #ACTUALITE

Les organisateurs et invités d'honneur de la manifestation (Ph. Wakat Séra)
Les organisateurs et invités d'honneur de la manifestation (Ph. Wakat Séra)

Des milliers de Burkinabè, répondant à l’appel du Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (CISC), ont marché ce samedi 12 janvier 2019 dans les artères de Ouagadougou, pour dénoncer les conflits communautaires dont ceux de Yirgou, une localité située au Centre-nord du Burkina, qui ont fait environ 70 morts entre le 1er et le 3 janvier. Cette manifestation qui a rassemblé toutes les ethnies (une soixantaine) du Burkina Faso, selon ses organisations, a permis aux marcheurs de s’indigner contre les « lâches tueries» de Yirgou. Les manifestants ont demandé aux autorités qui ont été « laxistes » sur cette affaire au début, de s’assumer et punir les auteurs de ces crimes odieux à la hauteur de leur forfaiture.

Venus de toutes les contrées du Burkina Faso, des milliers de personnes, se sont retrouvées ce samedi à la Place de la Nation de Ouagadougou, pour dire « non » aux tueries de Yirgou et dire « plus jamais » un tel drame dans le pays des « Hommes intègres ». En solo, duo ou en groupe, les manifestants ont dénoncé avec véhémence les conflits communautaires notamment celui de Yirgou, où des éléments des Koglwéogo (groupes d’autodéfense) s’en sont pris à une dizaine de villages pour abattre froidement des  Peuhl accusés de complicité avec des terroristes. Cette crise a donc été de trop, en témoigne sa violence, son horreur et son ampleur.

Les marcheurs mains levées pour dire non aux assassisnats ciblés (Ph Wakat Séra)
Les marcheurs mains levées pour dire non aux assassisnats ciblés (Ph Wakat Séra)

Les manifestants ont marché de la Place de la Nation, en passant par la Place du cinéaste, la Cathédrale, l’avenue Kwamé N’Krumah, le rond-point des Nations unies avant de rejoindre leur point de départ, soit un circuit situé en plein cœur de la capitale burkinabè, pour s’indigner et crier leur ras-le-bol contre les assassinats ciblés. C’est à travers une marche silencieuse qu’ils ont appelé à une diligence dans les enquêtes et distiller des messages de conscientisation afin que chaque Burkinabè prenne conscience de l’importance du vivre-ensemble. Les mains levées à chaque arrêt ou intersection, les manifestants par ce geste disent « non ! » et « plus jamais » de telles horreurs au Burkina Faso qui fait déjà face aux attaques terroristes.

Des responsables politiques à la manifestation contre le drame de Yirgou (Ph. Wakat Séra)
Des responsables politiques à la manifestation contre le drame de Yirgou (Ph. Wakat Séra)

Cette manifestation est une « occasion » offerte à tous les filles et fils de la nation pour se « parler franchement afin que l’avenir soit meilleur et que le Burkina puisse connaître un rayonnement radieux », a déclaré sur le haut du podium, le président du comité de crise du drame de Yirgou, présenté comme le président du Collectif, El Hadj Hassan Barry. «  Les 60 ethnies du Burkina Faso sont ici aujourd’hui, donc je peux dire que le Burkina n’a pas d’ethnie mais des Burkinabè », s’est dit très ému, M. Barry, qui a été acclamé par les manifestants, écoutant religieusement les messages des intervenants.

A cette manifestation, les messages distillés par les pancartes et banderoles sont évocateurs vu l’ampleur du drame. « Plus jamais ça au Burkina Faso ! », « Plus jamais de lynchage ethnique dans notre Faso! », « Tous unis contre les nettoyages ethniques ! », « Cultivons la cohésion sociale et la coexistence pacifique entre nos communautés ! », « Nous interpellons le gouvernement sur son rôle d’assistance aux victimes de Yirgou ! » ou « Devoir de justice pour Yirgou et droit de vivre pour tous au Faso ! », sont quelques messages visibles interpellateurs que scandaient de temps en temps des marcheurs.


« La situation dramatique de Yirgou a entraîné beaucoup de pertes en vie humaine avec au moins 75 morts, et plus de 6 000 déplacés. Les chiffres que nous enregistrons continuent d’évoluer sur le terrain », a déclaré le porte-parole du Collectif, Dr Daouda Diallo, continuant que « sur le plan social, une bonne assistance sociale est mise en place dans la commune de Barsalgo (commune abritant Yirgou), mais elle est très défectueuse et insuffisante dans la commune de Kelbo et Arbinda ».

Selon Daouda Diallo, les déplacés « ont des sérieux problèmes pour se nourrir, se vêtir et se soigner. La prise en charge psychologique laisse à désirer. Sur le plan économique, beaucoup de biens ont été détruites et emportés. Les animaux des déplacés sont toujours pris en otage par les Koglwéogo (auteurs des crimes) qui prétendent s’approprier ou héritier désormais de ces animaux ».


Le Collectif est convaincu que seul un Etat « fort » peut venir à bout de cette violence du fait du terrorisme. L’autorité de l’Etat, contrairement « aux tergiversations auxquelles nous assistons au détour de la gestion de cette crise, doit s’affirmer plus que jamais pour que cesse ce cycle de violence des Burkinabè contre des Burkinabè », a poursuivi le porte-parole du CISC qui a réitéré la volonté « inébranlable » de son organisation de voir la justice s’appliquer dans toute sa rigueur à « tous les auteurs de l’assassinat du chef de village de Yirgou et sa famille ainsi qu’à tous les criminels, auteurs des massacres injustifiés contre la communauté Peulh ». Seule une justice « rigoureuse et diligente peut nous épargner un cycle de violence aux conséquences imprévisibles et apaiser les cœurs des victimes », s’est convaincu Dr Daouda Diallo.

« A Yirgou, le massacre de la communauté peulh a duré trois jours sans la moindre réaction de nos forces de défense et de sécurité, ni des autorités administratives et politiques, encourageant ainsi les Koglwéogo dans leur salle besogne, après celle de Karangasso-Vigué, de Réo et de Ouagadougou », s’est plaint Me Ambroise Farama, avocat du Collectif, foulard noir au cou. « A Yirgou, il y a eu des violations graves des droits de la personne humaine. Ces crimes ne peuvent restés impunis vu leurs horreurs », a enchaîné l’avocat, interpellant le chef de l’Etat, Roch Kaboré quant à sa « responsabilité dans le dysfonctionnement de notre système judiciaire ».


Lors de cette manifestation, des témoignages poignants, des animations musicales concoctées pour la circonstance, des messages de paix, d’amour, les formules justes et à propos, d’un des maîtres de cérémonies qui maniait autant la langue peulh que celle mossi, les deux ethnies mises en cause dans ce drame, ont su apaiser les coeurs des manifestants et les égailler alors qu’ils laissaient voir dans leurs visages graves, pendant les moments de rassemblement (entre 8-9H), une intense douleur qui les a habités à la suite des tueries ignobles et injustifiées de Yirgou. Cela ajouté à la parenté à plaisanterie notamment entre les Bobo et les Peulh, les marcheurs ont converti leur douleur en joie et la manifestation, à les en croire, «  a atteint son objectif » qui est d’interpeller tout un chacun sur la nécessité et l’importance du vivre-ensemble au Burkina.

« Ce qui est arrivé à nos parents à plaisanterie, on ne le souhaite plus au Burkina Faso. Ça n’a pas touché que les Peulh mais tous les Burkinabè épris de paix. Que tu sois Peulh, Mossi, San, Bobo, Dafing…, on est tous de la même lignée ici au Burkina Faso. Quand vous regardez dans la foule, il y a toutes les ethnies du Burkina », a dit Siaka Sanou qui s’est présenté comme le chef des Peulh. M. Sanou, habillé dans sa tenue traditionnel bobo, est considéré par certains comme l’homme du rassemblement tant il s’est investi en usant de la parenté à plaisanterie pour apporter sa touche personnelle qui a contribué à détendre l’atmosphère et les humeurs des Peulh, majoritaires à cette marche-meeting puisse que directement concernés.

 

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