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RADIO TANKONNON

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La guerre des intelligences aura-t-elle lieu ?

Publié par RADIO TAN KONNON sur 8 Février 2018, 13:57pm

Catégories : #ANALYSE

Intelligence Artificielle. Ou IA, pour ceux qui en parlent à tous les coins de phrases. C’est l’expression à la mode. C’est le mot clé à placer pour lever des fonds, pour vendre des livres, ou lancer des polémiques sur les réseaux sociaux. Car ça y est, nous y sommes ! L’intelligence artificielle serait enfin intelligente, et devrait donc rentrer en compétition avec l’intelligence humaine. Et cette confrontation s’annonce houleuse. Car cette intelligence électronique est bien sûr porteuse de nombreuses promesses, mais elle comporte également de nombreux risques. Cette probable opposition pourrait même déclencher une véritable « guerre » entre l’homme et la machine, comme le sous-entend le titre du sulfureux livre de Laurent Alexandre, La Guerre des intelligences. Une guerre pour quoi, me direz-vous ? Peut-être pour notre propre survie, face à des machines potentiellement autonomes et assurément concurrentes des humains dans de nombreux domaines.


 

Où en est-on dans les progrès de l’intelligence artificielle ?
D’après les spécialistes, nous sommes sortis de ce qu’on pourrait appeler « l’hiver de l’intelligence artificielle », pendant lequel rien ne fonctionnait réellement. Nous sommes entrés dans une phase plus opérationnelle, avec des applications concrètes dans notre vie quotidienne. Par exemple avec Google pour les recherches, Waze pour s’orienter en voiture, ou Uber pour trouver un taxi. Le mariage puissant entre des algorithmes, c’est à dire des programmes, et le traitement de milliards de données constitue une intelligence artificielle opérationnelle. Des progrès fulgurants ont aussi été réalisés dans la reconnaissance d’images et d’objets par les machines. Et puis, la récente victoire d’une machine sur l’homme au jeu de go a montré que l’intelligence artificielle avait franchi un nouveau cap en devenant capable d’apprendre. Et un pas de plus pourrait être franchi dans la seconde partie du siècle avec ce que les techno-prophètes appellent l’intelligence artificielle forte qui aurait tout bonnement conscience d’elle-même, et pourrait donc supplanter totalement l’homme. Et, c’est là qu’on passe (sans doute) de la science à la fiction. 

 

Les machines programmées par les humains franchiront-elles le pas de la conscience et de l’autonomie ?
Cela fait encore débat. Pour l’instant. Certains spécialistes, comme Jean-Gabriel Ganascia, avancent que la singularité d’une machine est tout simplement un mythe. Que cela n’arrivera jamais. Autrement dit qu’une machine ne peut, pas définition, se doter d’une conscience d’elle même, de raisonner par elle même, de prendre des décisions librement. D’être, comme l’exprime Ganascia, « philosophiquement autonome ». Bref, de devenir humaine. Par ailleurs, il faut préciser que ces extrapolations futuristes reposent sur des évolutions assez aléatoires, comme la loi de Moore, qui voit la puissance des micro-processeurs doubler tous les 18 mois depuis plus de 40 ans. Sauf que cette pseudo loi, qui est plus empirique que scientifique est probablement en train d’atteindre sa limite physique. Et rien ne dit que l’amélioration exponentielle de ce qu’on appelle l’intelligence artificielle va continuer. Enfin, pour obtenir une intelligence artificielle forte, encore faudrait-il comprendre totalement comment fonctionnent les multiples intelligences humaines (et pas uniquement celles mesurées par le QI) et leur combinaisons entre elles, pour les reproduire dans des machines. Ce qui n’est pas encore à l’ordre du jour étant donné l’âge quasi préhistorique des neurosciences.

Vers une compétition à venir entre l’intelligence artificielle et l’intelligence humaine ?
Cette confrontation a déjà commencé. Jusqu’à peu de temps, les différentes révolutions industrielles se sont surtout employées à remplacer l’homme par des machines dans des tâches et des opérations plutôt manuelles, répétitives et assez simples. Aujourd’hui, l’homme rentre en compétition frontale avec les machines pour des tâches intellectuelles complexes, pour lesquelles nous sommes et nous serons (par définition) dépassés par les machines à cause de la vitesse d'exécution des tâches et le stockage de la mémoire (processeur + big data). Par exemple, permettre différentes analyses prédictives pour comprendre et guérir le cancer et bien d’autres maladies, rendre les voitures autonomes, ou encore écrire des articles ou composer de la musique. Les champs d’applications sont infinis et nous rentrons dans cette phase de compétition, où l’homme est et sera à la fois assisté et menacé par des machines. Les prévisions les plus alarmistes prévoient des destructions massives d’emplois qui constituent sans doute la premier acte de cette guerre des intelligences. 

 

Comment éviter cette confrontation avant qu’elle ne tourne mal ?
Le débat fait rage. Il se dessine un clivage entre ce que l’on peut appeler les bio-conservateurs, qui défendent l’homme tel qu’on le connaît en gros depuis homo-sapiens, et la mouvance transhumaniste qui estime que l’homme est par définition limité et donc qu’il sera dépassé tôt ou tard par la technologie. Face à cette compétition, le courant technologique pense qu’une des solutions est d’hybrider l’homme avec la machine. Les progrès conjoints de l’IA et des neurosciences promettent en effet la réussite prochaine de l’implantation de puces électroniques dans nos cerveaux pour augmenter nos capacités cognitives et mémorielles. Cette hybridation homme-machine permettrait ainsi à l’homme de ne pas se faire dépasser par ses propres créations. Si ces projets sont encore de la science-fiction, ils bénéficient d’investissements massifs notamment sous l’impulsion du célèbre entrepreneur californien Elon Musk, créateur des voitures électriques Tesla. D’autres formes d’hybridation tout aussi effrayantes sont en cours de développement chez Facebook, qui travaille à des formes de télépathies électroniques. Face à ces évolutions qui donnent le vertige, les bio-conservateurs sont, il faut le reconnaître, encore assez démunis en terme de réponses concrètes, car il paraît difficile, voire impossible, d’arrêter ce train lancé à toute vitesse et financé par les plus grandes firmes de la planète.


 

Quelles perspectives à court terme ?
Si les projets d’hybridation et d’intelligence artificielle forte sont sans doute plus farfelus que probables, une chose est sûre. Ces bouleversements majeurs nous interrogent sur notre degré de complémentarité avec les systèmes d’intelligence artificielle. Les progrès de l’IA exigent donc de repenser complètement l’éducation et la formation pour que nous soyons en capacité de rester complémentaires de l’IA, mais aussi de penser une éthique de son utilisation et de mettre en place les gardes-fous nécessaires pour que les IA, même faibles, ne soient pas mal utilisées. 

 

En imitant de plus en plus et de mieux en mieux les intelligences humaines, les machines sont en train de nous révéler, en creux, ce que nous sommes et cette mise en miroir est passionnante... pour autant qu’elle nous révèle le meilleur de nous-mêmes.

 

Jean Pouly
Consultant - Entrepreneur

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