
L’audition du colonel-major Boureima Kiéré s’est poursuivie ce 13 novembre 2017. L’officier supérieur a continué à se démarquer du coup d’Etat, même s’il reconnait avoir signé la déclaration qui faisait du général Gilbert Diendéré le président du Conseil national de la démocratie (CND). Il était aussi contre le putsch quand bien même il a ordonné une mission héliportée pour chercher du matériel de maintien de l’ordre. Selon lui, la situation de pourrissement a été exacerbée par l’ancien Premier ministre Yacouba Isaac Zida. Il existait alors trois clans, les pro-Diendéré, les pro-Zida et les non-alignés.
Le colonel-major Boureima Kiéré a continué à se défendre à la barre du tribunal militaire. Au deuxième jour de son passage, le chef d’état-major particulier du président du Faso de l’époque est resté campé sur sa position. Il n’était pas membre du Conseil national de la démocratie (CND). En revanche, c’est bien lui qui a signé la déclaration lue à la télévision pour acter le coup d’Etat.
« Je n’avais aucun grief contre la Transition, mon souci c’était la survie du RSP », a clamé l’homme qui a continué à dire que c’est le 16 septembre qu’il a été mis devant le fait accompli avec l’arrestation des autorités de la Transition. Et pourtant, le parquet a tenté de prouver le contraire. Le 17 septembre, avant même la déclaration à la télé, précisément à 5h59, Boureima Kiéré a reçu un message de la part de « Golf épouse » (présenté comme l’épouse du général Diendéré) par le parquet) qui dit ceci : « J’ai besoin de vous pour régler le problème de technicien à la télé ».
Pour le ministère public, c’est bien la preuve que le colonel-major était au parfum de tout ce qui se tramait avant que la situation ne soit rendue publique. Mais pour l’accusé, il n’en est rien ; d’ailleurs, il n’a pas ouvert ledit message et n’a pas répondu. Des messages, Boureima Kiéré en a également reçus en provenance de la Côte d’Ivoire.
Dans l’un d’eux, son interlocuteur lui conseille d’utiliser les réseaux sociaux pour faire croire que 500 militaires venaient de rallier le RSP, sans oublier de couper la lumière, positionner de grosses armes à certains endroits de la ville et tirer quelques coups. A la lecture de ces messages, l’ancien chef d’état-major particulier du président du Faso a noté qu’il ne les a pas lus et n’y a pas non plus répondu.
Le jeu de diplomatie du parquet ne passe pas
Pendant le coup d’Etat, le colonel-major a beaucoup échangé avec des militaires ivoiriens. Le parquet, en lisant lesdits messages, n’a pas voulu citer les noms des correspondants ivoiriens. Me Prosper Farama de la partie civile interpelle le président à ce sujet.
Pour lui, pour la transparence dans les débats, il faut citer les noms, d’autant plus que, quand il s’agit de correspondants locaux, le ministère public ne cache pas les identités. Mais pour le parquet, c’est par souci de sauvegarder les bonnes relations entre les deux pays, « pour éviter de remuer le couteau dans la plaie » que les noms ne sont pas cités.
Il n’en fallait pas plus pour que les avocats tous bords confondus attaquent. « Il faut citer les noms pour éviter un procès ‘mouta mouta’ », clame un avocat de la partie civile. Son confrère de la défense le prend au mot. « C’est maintenant que vous voyez qu’il y a un procès mouta mouta », répond Me Bonkoungou.
« L’argument du parquet n’est pas juridique. Il n’est pas question de faire de la diplomatie dans un procès »