
Ce mercredi, les Malgaches ont voté pour l'un des deux candidats et adversaires de longue date, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina.
C'est un duel au couteau que se livrent, à Madagascar, les deux candidats et ex-chefs d'État Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina. Ce mercredi, les Malgaches étaient appelés aux urnes pour départager au second tour de l'élection présidentielle ces deux poids lourds de la scène politique locale, déterminés à retrouver le pouvoir.
Si la journée de scrutin s'est déroulée sans incident notable, les opérations de dépouillement ont débuté en fin de journée dans une chaude ambiance. La rivalité et l'inimitié qui opposent les deux vainqueurs du premier tour font redouter de vives tensions à la proclamation des résultats. Ces derniers, annoncés pour après noël, devraient être serrés selon la plupart des analystes. En novembre dernier, Andry Rajoelina, un ex-publicitaire et disc-jockey de 44 ans, était arrivé en tête avec 39,23% des voix. Marc Ravalomanana, 69 ans, qui a fait fortune à la tête d'un groupe laitier, le talonnait avec 35,35%.
Une campagne agressive
Dès ce matin, les deux finalistes sont allés voter à Tananarive. «Je suis confiant, je pense que le peuple malgache tranchera une bonne fois pour toutes pour celui qui dirigera le pays», a déclaré Andry Rajoelina. «Avec la participation de tout le peuple malgache, j'espère que l'on va changer Madagascar», a lancé en retour Marc Ravalomanana. Lors des dernières semaines de campagne, tous les deux ont laissé libre cours à leur rancunes personnelles, nées de la crise de 2009. Élu président en 2002, Marc Ravalomanana a été contraint à la démission sept ans plus tard par une vague de violentes manifestations orchestrées par Andry Rajoelina. Maire de la capitale, ce dernier avait alors été installé par l'armée à la tête d'une présidence non-élue. Mais en 2013, les deux adversaires ont été privés de revanche car interdits de candidature à la faveur d'un accord de sortie de crise validé par la communauté internationale. C'est Hery Rajaonarimampianina qui a alors remporté l'élection prenant la tête du pays. Il a finalement été éliminé dès le premier tour, ce qu'il n'a pas manqué de contester, en vain.
Pendant la campagne, pour rallier les indécis et les abstentionnistes, Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana n'ont pas lésiné sur leurs moyens, apparemment illimités, ni sur les accusations. Dès leur second débat télévisé dimanche dernier, Marc Ravalomanana a reproché à son rival de préparer la fraude, faisant état de la circulation de «fausses cartes d'identité et de fausses cartes d'électeurs». Il a assuré aujourd'hui qu'il n'accepterait «jamais» les résultats «s'il y a de la fraude». Et sitôt les bureaux de vote fermés, le camp adverse a riposté en dénonçant les «nombreuses manipulations, actes de corruption et tentative de détournement des voix de la part des partisans du candidat».
Un risque important de tensions
Pour nombre d'observateurs, ces échanges laissent présager de très vives tensions dès l'annonce des premiers résultats significatifs, annoncés par la Commission électorale (Ceni) après Noël seulement. «Les résultats pourraient être très serrés et, dans ce contexte, même des irrégularités très minimes pourraient amener l'un ou l'autre candidat à les contester», a pronostiqué Marcus Schneider, analyste à la fondation allemande Friedrich Ebert. Le premier ministre en exercice Christian Ntsay a appelé les deux candidats à la raison. «Je suis sûr qu'ils sauront calmer leurs partisans (...), le pays ne mérite pas d'autres troubles», a-t-il estimé.
Ce face-à-face au tour très personnel a, par ailleurs, largement occulté les problèmes de fond du pays, un des plus pauvres du continent africain. Manque criant d'infrastructure, corruption, insécurité, pauvreté, la Grande île et ses 25 millions d'habitants cumulent tous les handicaps. Victime du réchauffement climatique, sa pointe sud souffre depuis des années d'une sécheresse qui met en péril sa population.
SOURCE. FIGARO.FR