Depuis la suspension des activités politiques par la Transition militaire le 10 avril 2024, les voix des acteurs politiques maliens se sont faites discrètes, voire silencieuses. Cependant, une montée progressive de la contestation est observée, surtout après le 24 mars 2024, date que les opposants considèrent comme le terme légitime de la Transition. De plus en plus, les hommes politiques, notamment les signataires de la Déclaration du 31 mars 2024, manifestent leur défiance envers le colonel Assimi Goïta et son pouvoir.
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Un acte de résistance : La réunion séditieuse des 11 opposants
C'est dans ce contexte de fronde politique que s'inscrit la réunion qualifiée de séditieuse de 11 opposants arrêtés à Bamako le 21 juin 2024. Ces opposants, parmi lesquels Moustapha Dicko, vice-président de l'Alliance pour la Démocratie au Mali-Parti Africain pour la Solidarité et la Justice (Adema-PASJ), se sont retrouvés dans un domicile privé pour exiger le retour à un pouvoir civil. Cette réunion marque une prise de position courageuse et assumée contre les restrictions imposées par les autorités militaires.
Après leur arrestation, ces opposants ont été soumis à des interrogatoires par la Brigade d'Investigation Judiciaire (BIJ) avant d'être présentés au procureur. Il leur est reproché de passer outre l'interdiction des activités politiques et de détenir chacun un projet de plan d'action visant à mobiliser la population pour l'avènement d'un État de droit au Mali. En se réunissant ainsi, les opposants ont clairement décidé de prendre leurs responsabilités face à un régime militaire qui cherche à museler toute opposition.
La contestation monte en puissance
Cette arrestation, loin de décourager les contestataires, semble galvaniser une classe politique de plus en plus réfractaire à l’autoritarisme de la Transition. Le rassemblement des 11 opposants, bien que réprimé, est un signe des temps : la classe politique refuse de se soumettre à un régime militaire qui prolonge indéfiniment son mandat.
Individuellement ou collectivement, les opposants maliens manifestent leur refus de courber l’échine face à une Transition qui semble avoir renié ses promesses de retour à la normalité constitutionnelle. En effet, la prolongation de la Transition permet juridiquement à Assimi Goïta d’être candidat à la prochaine présidentielle, ce qui est perçu par l’opposition comme une lente mise à mort politique orchestrée par les putschistes de 2020.
Une stratégie de résistance et de défiance
L’opposition malienne, malgré les risques, s’organise pour dire « Basta » à la chape de plomb qui s’est abattue sur elle. Elle multiplie les recours juridiques et les prises de parole publiques, bien que celles-ci soient dangereuses dans un climat de répression accrue. Ces actions visent à mobiliser l’opinion publique nationale et internationale contre ce qu’ils perçoivent comme un accaparement du pouvoir par les militaires.
Cependant, cette résistance acharnée soulève plusieurs interrogations : quels résultats ces actions peuvent-elles réellement produire face à un rapport de force déséquilibré ? Les militaires au pouvoir risquent-ils de s'aliéner une partie significative de la population malienne, si ce n’est déjà le cas ?
Les conséquences d’un rapport de force déséquilibré
Le défi lancé par l'opposition est certes audacieux, mais il se heurte à une réalité : le rapport de force n'est pas en sa faveur. Les militaires, forts de leur position de contrôle, ne semblent pas prêts à céder aux pressions internes et externes. Néanmoins, la répression systématique et les actes liberticides risquent de créer une fracture profonde entre le pouvoir militaire et une partie de la population.
La société malienne, déjà éprouvée par des années d’instabilité politique et de conflit, pourrait ne pas rester indéfiniment passive face à l’autoritarisme croissant. Si le pouvoir militaire persiste dans sa répression, il pourrait voir émerger une opposition de plus en plus résolue et soutenue par une population lassée des promesses non tenues de la Transition.
Conclusion : Un appel à la vigilance et à la mobilisation
La situation actuelle au Mali appelle à une vigilance accrue et à une mobilisation continue pour défendre les principes démocratiques et les droits civils. Les actions de l’opposition, bien que risquées, sont essentielles pour maintenir la pression sur le régime militaire et pour rappeler à la communauté internationale l’importance d’un retour rapide à un régime civil légitime.
En fin de compte, la résistance des opposants maliens est un cri de ralliement pour tous ceux qui croient en la démocratie et en l’État de droit. Il est crucial que ces voix ne soient pas étouffées et que le dialogue reste ouvert pour trouver une solution pacifique et durable à la crise politique qui secoue le Mali. Le chemin vers la stabilité et la démocratie est semé d’embûches, mais il est essentiel pour l’avenir du pays et pour la dignité de ses citoyens.
Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon