Afrique : entre promesses et défis, l’appel vibrant d’Antonio Guterres pour une justice climatique et une pleine réalisation du potentiel continental

L’Afrique du Sud, pays charnière du continent africain, inaugure une année historique en assumant la présidence tournante du G20, ce puissant forum intergouvernemental représentant 85 % de l’économie mondiale. Ce rôle, inédit pour un État africain, intervient à une période où le continent lutte pour s’affirmer sur la scène internationale, tout en affrontant des défis structurels et environnementaux sans précédent.

Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies

En visite officielle en Afrique australe, Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, a saisi cette opportunité pour livrer un plaidoyer vibrant en faveur de l’Afrique. Lors d’un discours prononcé à la réunion des sherpas du G20, il a souligné le potentiel immense du continent, tout en appelant à une « justice climatique » pour corriger les profondes inégalités historiques et environnementales.

Un potentiel continental encore entravé

« Le potentiel de l’Afrique est incontestable », a affirmé Antonio Guterres devant un auditoire attentif. Avec ses 1,4 milliard d’habitants, dont une majorité de jeunes, le continent africain possède une richesse démographique et culturelle qui, selon le secrétaire général, constitue une force motrice unique pour le monde.

Cependant, ce potentiel est freiné par des « injustices profondément enracinées dans l’histoire du colonialisme », a-t-il rappelé. Ces blessures du passé continuent de modeler les défis économiques, sociaux et politiques auxquels l’Afrique est confrontée. La marginalisation des économies africaines dans les chaînes de valeur mondiales, les inégalités d’accès au financement international et la persistance de dettes écrasantes en sont des manifestations concrètes.

Antonio Guterres a également mis en lumière les opportunités inexplorées qu’offre l’Afrique. « Le formidable esprit d’entreprise qui anime ce continent est une source d’inspiration. Des start-ups technologiques de Nairobi aux innovations agricoles en Afrique de l’Ouest, l’Afrique est un creuset d’idées qui pourraient transformer le monde. »

La justice climatique : une urgence vitale pour l’Afrique

Un thème central du discours du secrétaire général a été la justice climatique, une question brûlante pour l’Afrique, qui subit de plein fouet les effets du réchauffement climatique.

Malgré une contribution infime aux émissions mondiales de gaz à effet de serre (moins de 4 %), le continent est confronté à des conséquences disproportionnées. Les sécheresses récurrentes, les inondations dévastatrices et les températures extrêmes sapent les économies, exacerbent l’insécurité alimentaire et déplacent des millions de personnes.

Antonio Guterres a martelé un impératif : limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degré Celsius. « L’Afrique se réchauffe plus rapidement que la moyenne mondiale. Sans action urgente, cette crise climatique risque de devenir encore plus incontrôlable. »

Il a également appelé les grandes économies, membres du G20, à honorer leurs engagements financiers pour aider les pays africains à s’adapter aux impacts climatiques. L’objectif des 100 milliards de dollars par an pour le financement climatique, promis depuis la COP15 en 2009, reste largement inachevé.

L’Afrique du Sud à la tête du G20 : un symbole porteur d’espoir

L’année 2024 marque un tournant diplomatique majeur pour l’Afrique, avec l’Afrique du Sud à la présidence du G20. Ce rôle confère à Pretoria une plateforme stratégique pour faire entendre la voix du continent sur des enjeux mondiaux tels que la réforme des institutions financières internationales, l’accès équitable aux vaccins ou encore la transition énergétique.

Antonio Guterres a salué cette nomination comme une reconnaissance de la contribution africaine à la gouvernance mondiale. « L’Afrique du Sud peut être le porte-voix des aspirations de tout un continent, et même au-delà. Elle porte l’espoir d’une transformation profonde des relations entre le Nord et le Sud. »

Il a également encouragé Cyril Ramaphosa, président sud-africain, à placer la lutte contre les inégalités mondiales et le climat au centre des discussions du G20.

Une rencontre stratégique avec Cyril Ramaphosa

Après avoir échangé avec le ministre sud-africain des Relations internationales et de la Coopération, Antonio Guterres s’apprête à rencontrer Cyril Ramaphosa pour des discussions stratégiques.

Le président sud-africain, qui a récemment réaffirmé son engagement en faveur d’une transition énergétique juste, doit affronter des défis colossaux. L’Afrique du Sud, première économie industrielle du continent, reste fortement dépendante du charbon, et sa transition vers des énergies renouvelables nécessite des investissements massifs.

Cette rencontre sera également l’occasion de discuter de la sécurité régionale, en particulier dans des zones sensibles telles que le Mozambique, où des insurrections jihadistes menacent la stabilité.

Un appel à l’action mondiale

Pour Antonio Guterres, la présidence sud-africaine du G20 est une opportunité unique d’amplifier les priorités africaines sur la scène mondiale. Il a toutefois insisté sur la nécessité pour le reste du monde de répondre aux attentes du continent.

« L’Afrique ne demande pas l’aumône. Elle réclame justice. Justice pour les injustices du passé, justice climatique et justice économique », a-t-il conclu avec force.

Alors que le continent se trouve à un carrefour décisif, ce moment historique peut soit consolider l’Afrique en tant qu’acteur clé de l’avenir mondial, soit perpétuer les cycles d’inégalités. Tout dépendra de la capacité des dirigeants africains, avec le soutien de leurs partenaires internationaux, à transformer ce potentiel en une réalité tangible pour les générations futures.

Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon