L’annonce du KORAG (Collectif pour la Récupération des Biens Mal Acquis et la Reddition des Comptes) sur le démantèlement de l’empire économique d’Alizet Gando a fait l’effet d’un séisme dans l’opinion publique burkinabè. Ce vaste réseau, jadis symbole de prospérité et d’influence, est désormais associé à une série de malversations, de privatisations douteuses et d’accusations graves portant atteinte à l’intérêt national. Si les enquêtes parlementaires avaient déjà levé un coin du voile sur les pratiques opaques entourant la SOCOGIB (Société de Construction et de Gestion Immobilière du Burkina), les récentes accusations pointent vers un système tentaculaire où intérêts personnels et atteintes à la souveraineté nationale se mêlent dangereusement.
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Une saga foncière au cœur des controverses
L’affaire remonte à plusieurs années, lorsque des soupçons de mauvaise gestion avaient été soulevés autour de la privatisation de la SOCOGIB, un fleuron national. Ce processus, loin d’être un modèle de transparence, avait révélé un « partage » systématique des parcelles au profit d’intérêts privés, au détriment des Burkinabè ordinaires, encore nombreux à attendre leurs lopins de terre.
Le rapport de la récente enquête parlementaire met en lumière un véritable pillage foncier orchestré par Alizet Gando, ex-PDG de Tan-Aliz. Ce dernier, avec la complicité d’acteurs influents, aurait procédé à la vente massive de parcelles à des tiers privilégiés, accentuant ainsi les inégalités et privant des milliers de citoyens de leur droit légitime à la propriété foncière.
Un empire économique pris dans la tourmente judiciaire
L’empire Tan-Aliz, autrefois présenté comme un modèle de réussite entrepreneuriale, se retrouve désormais englué dans une spirale judiciaire. Les accusations à l’encontre de son ex-dirigeant vont bien au-delà des questions foncières. Selon le KORAG, des biens mal acquis auraient été détournés à des fins subversives, notamment pour soutenir des activités visant à déstabiliser le régime en place.
L’implication de Sala, l’épouse du frère cadet de l’ex-président Blaise Compaoré, ajoute une dimension politique à cette affaire déjà explosive. Son rôle présumé dans l’utilisation de ces ressources pour soutenir des ennemis déclarés du peuple burkinabè soulève des interrogations sur l’étendue des complicités et les ramifications d’un système qui semble avoir fonctionné pendant des années à l’abri des regards.
Les dessous nauséabonds d’un système oligarchique
Le rapport actualisé par le KORAG fait état de pratiques profondément ancrées dans le système de gouvernance antérieur. Des ventes de parcelles « à tire-larigot » et des transferts financiers douteux auraient permis à un cercle restreint de profiter de ressources qui auraient dû bénéficier à la collectivité.
L’utilisation de ces fonds dans des activités subversives constitue un point de basculement. Si ces allégations se confirment, elles révèleraient un mépris flagrant pour l’intérêt national, où les ambitions personnelles et la recherche effrénée du pouvoir prennent le pas sur le bien-être collectif.
Une affaire aux implications multiples
Cette affaire soulève des questions fondamentales sur la gestion des biens publics, la transparence dans les privatisations et la reddition des comptes. Elle met également en lumière les défis auxquels le Burkina Faso est confronté dans sa quête de justice et de réconciliation nationale.
Les accusations de « biens mal acquis » ne concernent pas uniquement Alizet Gando et son entourage. Elles posent également un problème systémique, où des institutions publiques auraient failli à leur devoir de vigilance, permettant ainsi la consolidation d’un empire économique aux ramifications douteuses.
Les 5 milliards : un mystère à élucider
Parmi les éléments les plus intrigants figure la référence aux fameux 5 milliards de francs CFA, un montant dont l’origine et l’utilisation demeurent floues. Certains observateurs évoquent des fonds utilisés pour financer des activités contre l’État, tandis que d’autres y voient le produit de transactions illicites liées à la privatisation de la SOCOGIB.
Ces fonds, s’ils existent, symbolisent le gouffre entre une oligarchie privilégiée et une population qui lutte quotidiennement pour sa survie. Leur traçabilité et leur récupération pourraient constituer une étape cruciale dans la lutte contre l’impunité et pour la restauration de la confiance publique.
Un tournant pour la gouvernance au Burkina Faso
L’intervention du KORAG s’inscrit dans un contexte où les attentes populaires en matière de justice sociale et de transparence sont particulièrement élevées. Pour le capitaine Ibrahim Traoré et son gouvernement, cette affaire représente une opportunité de démontrer leur engagement envers une gouvernance exemplaire et la lutte contre les dérives du passé.
La mise en lumière des pratiques d’Alizet Gando et de son empire est également un signal fort pour d’autres acteurs économiques et politiques. Elle rappelle que l’ère de l’impunité systématique est révolue et que les responsabilités individuelles seront systématiquement engagées.
Vers une justice réparatrice et une réhabilitation nationale
Au-delà des poursuites judiciaires, cette affaire ouvre un débat plus large sur la manière dont le Burkina Faso peut réparer les injustices du passé et poser les bases d’une société plus équitable. La récupération des biens mal acquis, leur réinvestissement dans des projets d’intérêt public et l’amélioration des mécanismes de contrôle sont autant de pistes à explorer.
L’affaire Tan-Aliz n’est pas seulement une affaire judiciaire ; elle est un miroir qui reflète les défis, les échecs et les espoirs d’un Burkina Faso en quête de renouveau. Dans ce contexte, les Burkinabè attendent des actions concrètes, des réformes structurelles et une justice exemplaire pour tourner définitivement la page de ces dérives oligarchiques.
Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon