Le nord-ouest du Nigeria est une nouvelle fois plongé dans l’horreur, avec l’enlèvement de plusieurs dizaines de personnes au cours du week-end dernier dans la région de Maradun, dans l’État de Zamfara. Selon les témoignages d’habitants et les déclarations des autorités locales, ce sont au moins cinquante individus, parmi lesquels des femmes et des enfants, qui ont été capturés par des hommes armés non identifiés. Ce nouvel acte de violence s’inscrit dans une longue série d’attaques qui gangrènent cette région en proie à des conflits chroniques.

Des assauts prémédités et impunis
Le porte-parole de la police de Zamfara, Yazid Abubakar, a confirmé l’incident, mais les détails restent flous. Halliru Attahiru, chef de communauté de Maradun, a relaté avec une vive émotion le raid qui a duré plus de deux heures. « Plusieurs femmes et jeunes enfants ont été enlevés. Le gouvernement n’a encore pris aucune mesure pour nous venir en aide », a-t-il confié. Tasiu Hamisu, un autre habitant touché par cette tragédie, a ajouté que certaines maisons ont été littéralement vidées de leurs occupants. Dans l’une d’elles, pas moins de vingt personnes ont été kidnappées.
Ces enlèvements massifs, perpétrés sans entrave, mettent en évidence l’absence criante de forces de sécurité capables de déjouer ces attaques. Les habitants, impuissants, se sentent abandonnés par les autorités et redoutent que la situation ne dégénère encore davantage.
Un modèle économique macabre : rançons et chaos
Depuis plusieurs années, les enlèvements ciblés et les prises d’otages de masse se sont banalisés dans le nord-ouest du Nigeria. Les assaillants, souvent désignés comme des « bandits », utilisent ces kidnappings comme une stratégie lucrative pour financer leurs activités criminelles. Les rançons exigées, atteignant parfois des sommes astronomiques, permettent à ces groupes d’étendre leur contrôle sur des territoires entières, réduisant les populations locales à l’état de proies faciles.
Ce modèle économique macabre n’est pas nouveau. Il rappelle l’enlèvement tristement célèbre de 276 écolières à Chibok en 2014 par Boko Haram. Une décennie plus tard, près de 100 de ces jeunes filles demeurent portées disparues, témoignant de l’incapacité des autorités à apporter des réponses concrètes à cette tragédie humaine.
Selon des rapports récents, plus de 1 500 jeunes filles ont été enlevées depuis l’affaire de Chibok, faisant des écoles et des villages de la région des cibles privilégiées pour ces groupes armés.
Une riposte militaire sous pression
Le chef de l’armée nigériane, Olufemi Oluyede, a réaffirmé cette semaine l’engagement des forces de sécurité à redoubler d’efforts pour contrer l’insécurité dans les régions septentrionales. Toutefois, les habitants de Zamfara expriment leur scepticisme quant à la capacité de l’État à prendre des mesures réelles et rapides. Pour l’instant, aucune force de sécurité n’a été déployée pour localiser ou libérer les captifs, et les assaillants n’ont pas encore revendiqué l’attaque.
Cette inertie, conjuguée à une absence de stratégie globale, laisse des milliers de civils dans un état de vulnérabilité extrême. « Nous vivons dans la peur constante de la prochaine attaque », a déclaré un habitant de Maradun. « Si l’armée ne vient pas ici rapidement, nous serons à la merci de ces bandits. »
Un avenir en suspens
Alors que la communauté internationale commence à s’intéresser de nouveau à cette crise humanitaire, les autorités nigérianes restent confrontées à un défi monumental. Le gouvernement devra non seulement renforcer les mécanismes de sécurité, mais aussi s’attaquer aux causes profondes de ces violences : la pauvreté endémique, les conflits communautaires et le manque de perspectives économiques pour une jeunesse désœuvrée.
En attendant, les familles des captifs vivent dans une angoisse insupportable, espérant des nouvelles de leurs proches et redoutant le pire. La crise des enlèvements au Nigeria est bien plus qu’un problème sécuritaire : elle est le symptôme d’une crise systémique qui menace de déstabiliser l’ensemble de la région.
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