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RADIO TANKONNON

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La construction historique et politique de la Haute-Volta : Une quête d'éclaircissements sur des questions fondatrices

Publié par RADIO TAN KONNON sur 4 Décembre 2024, 07:50am

Catégories : #ANALYSE

Introduction : une histoire à revisiter

Le Premier ministre Apollinaire Joachimson Kyélem de Tambèla
Le Premier ministre Apollinaire Joachimson Kyélem de Tambèla

La récente déclaration de Son Excellence le Premier Ministre du Burkina Faso, le 2 décembre 2024, a relancé le débat sur la datation de l’indépendance et sur la compréhension des jalons historiques qui ont conduit à la formation de la Haute-Volta, prédécesseur de l’actuel Burkina Faso. Les interrogations soulevées par les citoyens Harouna Dicko, Abdoul Aziz Congo et Roland Goungounga traduisent une soif de vérité historique. Cet article propose une exploration approfondie des faits historiques mentionnés, répondant aux interrogations spécifiques, tout en éclairant le contexte plus large.

1. La colonie de la Haute-Volta a-t-elle été formée en 1919 sur les mêmes limites territoriales que le Cercle du Mossi ?

Non. La création de la Haute-Volta par le décret du 1er mars 1919 n'a pas reposé uniquement sur les limites territoriales du Cercle du Mossi. La nouvelle colonie a regroupé plusieurs ensembles géographiques, comprenant non seulement le Cercle du Mossi, mais également des territoires auparavant rattachés à des régions administratives voisines comme le Soudan français, la Côte d’Ivoire et le Niger.

Le Cercle du Mossi représentait historiquement le territoire des royaumes mossis, principalement celui du Yatenga et du Wogodogo (Ouagadougou), mais la colonie de la Haute-Volta englobait une diversité ethnique et géographique qui dépassait ces entités. Elle incluait les Gourounsi, les Gourmantché, les Samo, les Lobi, et d’autres peuples, signalant une mosaïque culturelle et politique créée à des fins administratives coloniales.

2. Comment le Cercle du Mossi, conquis à partir de 1896, a-t-il été intégré au Soudan français créé en 1890 ?

L'intégration du Cercle du Mossi au Soudan français en 1890 avant même sa conquête effective s’explique par une logique administrative coloniale anticipatoire. Les frontières administratives tracées par les puissances coloniales souvent précédaient les campagnes militaires. Le Soudan français, officiellement constitué en 1890, avait pour ambition de regrouper des territoires stratégiques au Sahel pour former une entité économique et politique gérée depuis Bamako.

En 1896, lorsque Ouagadougou fut prise sous la conduite du colonel Destenave, le Cercle du Mossi fut pleinement rattaché au Soudan français, confirmant une décision prise en amont. La conquête militaire venait ainsi valider un découpage administratif préexistant.

3. Quelle est la date précise de la création du Cercle du Mossi ?

Le Cercle du Mossi a été formellement établi en 1904, dans le cadre de la réorganisation administrative du Soudan français. Cette entité administrative couvrait essentiellement les territoires mossis, centrés sur Ouagadougou. La création du Cercle s’inscrivait dans une logique d’organisation et de pacification des territoires nouvellement soumis à l’autorité coloniale française.

4. Quelles étaient les limites territoriales précises du Cercle du Mossi ?

Le Cercle du Mossi englobait les régions correspondant aux grands royaumes mossis, notamment :

  • Wogodogo (Ouagadougou) : centre politique du pouvoir mossi.
  • Yatenga (Ouahigouya) : autre royaume mossi influent.
  • Fada N'Gourma : bien que limitrophe, intégrée partiellement pour des raisons stratégiques.

Les territoires environnants du Bani-Volta, du Liptako, et d’autres régions n’étaient pas inclus dans le Cercle du Mossi initialement. Ces zones ont été ajoutées progressivement pour former la colonie de la Haute-Volta en 1919.

5. Le Cercle du Mossi regroupait-il les territoires du Bani-Volta, du Liptako, du Gourma, des Gans, et des Gourounsi ?

Non, ces territoires étaient administrativement distincts du Cercle du Mossi jusqu’à la création de la colonie de la Haute-Volta. Le Bani-Volta et le Liptako, par exemple, étaient davantage sous influence des cercles du Soudan français ou du Niger. La diversité ethnique et géographique de la Haute-Volta résulte d’un regroupement opportuniste de ces régions dans le cadre de la réorganisation coloniale en 1919.

6. Quelles sont les véritables raisons de la création de la colonie de Haute-Volta ?

La formation de la colonie de la Haute-Volta en 1919 répondait à plusieurs objectifs :

  • Rationalisation administrative : Les territoires inclus dans la Haute-Volta étaient considérés comme éloignés des centres de décision administratifs des colonies voisines (Bamako pour le Soudan, Abidjan pour la Côte d’Ivoire).
  • Exploitation économique : La Haute-Volta constituait un réservoir de main-d’œuvre pour les grandes plantations de cacao et de café de la Côte d’Ivoire.
  • Contrôle stratégique : En regroupant ces territoires, la France consolidait son contrôle sur une région considérée comme vulnérable aux résistances armées et aux incursions étrangères.

7. La guerre du Bani-Volta a-t-elle influencé la création de la Haute-Volta ?

Oui, indirectement. La guerre du Bani-Volta, série de révoltes orchestrées par des populations locales contre l’autorité coloniale française dans les années 1915-1916, a révélé la nécessité pour les administrateurs coloniaux de réorganiser les territoires et d’instaurer une gestion plus directe et efficace. La création de la Haute-Volta en 1919 visait à stabiliser ces zones et à prévenir de futures insurrections.

Conclusion : une histoire à réécrire ?

Les interrogations soulevées par le Premier Ministre rappellent l’urgence de revisiter l’histoire nationale avec un regard critique et indépendant. Plus qu’un exercice académique, cet effort constitue une étape essentielle vers une souveraineté véritable, débarrassée des injonctions héritées de la colonisation. À l’instar de la réflexion sur la date de l’indépendance, il est impératif de convoquer les spécialistes et les archives pour une compréhension collective de cette histoire complexe, qui doit être appropriée par tous les Burkinabè.

Le Burkina Faso, pays des Hommes intègres, mérite une narration fondée sur la vérité et la justice historique, pour éclairer son chemin vers une indépendance pleinement assumée.

Saidicus Leberger

Pour Radio Tankonnon 

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