Le Mozambique et le Malawi se remettent difficilement des ravages causés par le cyclone Chido, une tempête tropicale d'une intensité rare, qui a frappé le sud-est de l'Afrique le 15 décembre dernier. Avec des vents atteignant 260 km/h et des pluies torrentielles, ce phénomène météorologique a provoqué une crise humanitaire et économique majeure, marquant l'un des épisodes climatiques les plus destructeurs de ces dernières années dans la région.
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Un bilan humain et matériel accablant
Dimanche, l’Institut mozambicain pour les catastrophes naturelles (INGD) a publié un bilan actualisé, portant à 94 le nombre de décès recensés dans le pays, contre 768 blessés. Le cyclone a touché plus de 600 000 personnes, dont une majorité dans la région de Cabo Delgado, déjà fragilisée par des années de conflit armé et d’insécurité alimentaire.
Au-delà des pertes humaines, les dégâts matériels sont colossaux. Des milliers d’habitations ont été détruites, laissant des familles sans abri. Les infrastructures essentielles, comme les routes, les écoles et les centres de santé, ont été sévèrement endommagées, entravant les efforts de secours et l’accès aux services de base. Les cultures, source de subsistance pour de nombreuses communautés, ont été ravagées, menaçant une crise alimentaire imminente.
Une crise économique amplifiée
Le passage de Chido n’a pas seulement bouleversé la vie quotidienne des populations touchées. Il a également laissé des cicatrices profondes sur l’économie mozambicaine. Le Fonds Monétaire International (FMI) a annoncé une révision à la baisse des prévisions de croissance économique du pays pour 2024. Initialement fixée à 4,3 %, cette prévision a été revue en raison des destructions provoquées par le cyclone et des violences post-électorales qui ont aggravé la situation politique et sociale.
La région de Cabo Delgado, riche en ressources naturelles, notamment en gaz naturel liquéfié (GNL), est particulièrement stratégique pour l’économie du Mozambique. Cependant, les activités d’extraction et les projets d’investissement sont menacés par la combinaison des catastrophes naturelles et des tensions sécuritaires persistantes.
Le Malawi également frappé
Outre le Mozambique, le Malawi voisin a subi de lourdes conséquences du passage de Chido. Bien que moins meurtrière, la tempête a causé des inondations massives dans plusieurs districts du sud du pays, détruisant des récoltes déjà compromises par des épisodes précédents de sécheresse. Les autorités malawites rapportent des centaines de déplacés, qui s’ajoutent aux milliers de familles déjà confrontées à la précarité.
L’impact sur le Malawi est particulièrement préoccupant, car le pays dépend fortement de son secteur agricole pour sa subsistance et son économie. Les dégâts causés par le cyclone risquent d’aggraver l’insécurité alimentaire, dans un contexte où 17 % de la population est déjà confrontée à une crise nutritionnelle.
Une réponse humanitaire complexe
Face à l’ampleur de la catastrophe, les organisations humanitaires tentent de mobiliser des ressources pour venir en aide aux populations sinistrées. Toutefois, la réponse est entravée par plusieurs facteurs, notamment l’enclavement des zones les plus touchées, les infrastructures défaillantes et le manque de financements.
Au Mozambique, des centaines de familles se retrouvent abritées dans des camps de fortune, dépendant d’une aide humanitaire encore insuffisante. Les conditions sanitaires dans ces camps sont préoccupantes, augmentant le risque d’épidémies de choléra et de maladies liées à l’eau.
Au Malawi, le gouvernement a lancé un appel à l’aide internationale pour faire face aux défis immédiats et à long terme. Cependant, la concurrence avec d’autres crises globales, notamment les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient, limite la disponibilité des fonds nécessaires pour répondre efficacement à cette crise régionale.
Des causes climatiques et structurelles
Le cyclone Chido s’inscrit dans une tendance inquiétante de phénomènes climatiques extrêmes de plus en plus fréquents et intenses, alimentés par le changement climatique. Les experts en climatologie soulignent que l’Afrique australe est particulièrement vulnérable à ces événements en raison de sa géographie et de sa faible résilience structurelle.
Cependant, les catastrophes naturelles ne sont qu’une partie du problème. La gestion des ressources, l’absence d’infrastructures adéquates et les tensions politiques exacerbent les vulnérabilités des populations face à ces aléas.
Un appel à l’action
Pour éviter que de telles catastrophes ne se transforment en crises humanitaires chroniques, des mesures urgentes doivent être prises. Cela inclut :
- Renforcer les infrastructures : construire des habitations et des routes résilientes aux intempéries.
- Accroître les investissements dans la prévention : mettre en place des systèmes d’alerte précoce et des plans d’évacuation.
- Promouvoir la coopération régionale : les pays d’Afrique australe doivent coordonner leurs efforts pour faire face collectivement aux défis climatiques.
- Mobiliser les financements internationaux : les bailleurs de fonds doivent reconnaître l’urgence de la situation et apporter un soutien financier et logistique adéquat.
Un avenir incertain
Le passage du cyclone Chido est un rappel brutal de la fragilité des écosystèmes humains et économiques face aux bouleversements climatiques. Alors que le Mozambique et le Malawi s’efforcent de se relever, la communauté internationale est appelée à intensifier ses efforts pour répondre aux besoins immédiats et bâtir une résilience durable.
Le combat contre les conséquences de cette catastrophe dépasse les frontières de ces deux nations. Il reflète une lutte plus vaste pour l’adaptation au changement climatique, un défi mondial qui exige une solidarité et des actions concertées à tous les niveaux.
Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon