Ouagadougou, 10 janvier 2025 — Lors d’une conférence de presse d’une rare intensité tenue à Ouagadougou, le procureur du Faso près le Tribunal de grande instance de Ouaga 1, Blaise Bakouli Bazié, a dressé un tableau éloquent de l’état de la lutte contre la corruption et la délinquance économique au Burkina Faso. Entre les récentes condamnations, les enquêtes toujours en cours et les futures opérations judiciaires, la justice burkinabè affiche une volonté ferme d'assainir les pratiques administratives et économiques du pays.
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Des procès retentissants : des peines exemplaires prononcées
« La lutte contre la corruption est une priorité nationale », a affirmé déterminé le procureur Blaise Bazié, soulignant les résultats tangibles obtenus par le pôle économique et financier (ECOFI) du Tribunal de grande instance de Ouaga 1. Sur douze affaires traitées, pas moins de 53 personnes ont été jugées pour des infractions graves telles que le détournement de deniers publics, l'enrichissement illicite, ainsi que le faux et usage de faux en écriture publique.
Parmi ces affaires marquantes, celle opposant le ministère public à Amidou Tiegna et trois autres prévenus a captivé l’attention de l’opinion publique. Si certains dossiers semblent avoir trouvé leur épilogue avec les condamnations prononcées, l’affaire demeure loin d’être entièrement close, a précisé le procureur, faisant état d’une instruction supplémentaire visant Camille Yaké Yé et d'autres personnes présumées impliquées.
Les peines prononcées dans ces affaires varient de 12 mois avec sursis à 15 ans d'emprisonnement ferme, à la mesure de la gravité des faits reprochés.
Les irrégularités autour du stade du 4 Août : une enquête approfondie
Dans le cadre de la réhabilitation du stade du 4 Août, symbole sportif majeur de la capitale burkinabè, des irrégularités graves ont été relevées dans la passation des marchés publics. Selon le procureur Bazié, quatre entités physiques et morales ont été mises en examen. D’autres responsables pourraient être également inquiétés alors que l’instruction se poursuit.
Ces pratiques illégales incluent notamment la conclusion de marchés par entente directe et sans respect de la mercuriale des prix, sous couvert de détournements de fonds publics. Le procureur a réaffirmé la détermination des autorités judiciaires à mener à bien ces procédures.
Des accusations graves contre des figures politiques
Le nom d’Alassane Bala Sakandé, ancien président de l’Assemblée nationale, a été cité au cours de cette conférence. Lui et cinq autres personnes sont poursuivis pour des faits de détournement de deniers publics, octroi d’avantages injustifiés et blanchiment de capitaux. Selon les allégations, ces responsables auraient usé de manœuvres frauduleuses pour conclure des marchés publics à des fins d'enrichissement personnel.
Le procès qui s’annonce pourrait être un moment crucial pour la justice burkinabè, mettant en lumière les systèmes d’abus de pouvoir qui ont longtemps miné l’administration publique.
L’opération « Casiers vides » : une mobilisation judiciaire sans précédent
Pour éviter l’engorgement des tribunaux, une vaste opération spéciale dénommée « Casiers vides » sera menée du 20 au 30 janvier 2025. Cette initiative vise à résorber près de 2 000 dossiers de citation directe ou de flagrant délit en attente d’être jugés, certains datant de plus de dix ans.
Afin d'accélérer le traitement des affaires et de rapprocher la justice des justiciables, des audiences délocalisées seront organisées dans différentes salles des mairies d’arrondissement, au siège de l’ex-Conseil économique et social (CES) et dans d'autres juridictions partenaires.
Une justice pédagogique et proche des citoyens
« Cette démarche vise non seulement à accélérer le traitement des dossiers mais également à remplir une fonction pédagogique essentielle », a expliqué le procureur Bazié. Il a insisté sur la nécessité d’une justice transparente et accessible, gage de la restauration de la confiance entre les citoyens et les institutions.
Un signal fort pour l'avenir
La conférence de presse du procureur Blaise Bazié marque une étape importante dans la lutte contre la corruption et la restauration de la légalité au Burkina Faso. Dans un contexte où la transparence et la responsabilité sont devenues des exigences citoyennes incontournables, la mobilisation de la justice burkinabè représente un signal fort pour l'avenir d’un pays désireux de rompre avec les pratiques du passé.
Les mois à venir s’annoncent décisifs, avec une vigilance accrue de la société civile et une volonté manifeste des institutions judiciaires de maintenir le cap sur la transparence et la probité. Le combat contre l’impunité est engagé, et c’est toute la nation qui espère voir fleurir les fruits de cette détermination.
Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon