Présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire : Entre héritage politique et aspirations de renouveau

Un rendez-vous électoral sous haute tension

À l'approche de l’élection présidentielle prévue pour octobre 2025, la Côte d’Ivoire se prépare à vivre un scrutin décisif dans un climat marqué par des incertitudes politiques, économiques et sociales. Alors que les grandes forces politiques affûtent leurs stratégies, les Ivoiriens s’interrogent sur l’avenir de leur pays, tiraillé entre l’héritage des décennies passées et les aspirations d’un renouveau démocratique.

Le président ivoirien Alassane Ouattara

Une configuration politique fragmentée

La scène politique ivoirienne demeure dominée par des figures historiques, mais elle est de plus en plus contestée par une nouvelle génération de leaders.

Le parti au pouvoir : Un successeur à trouver ?

Alassane Ouattara, président depuis 2011, entretient le flou sur ses intentions. S’il a annoncé en 2020 qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat, les rumeurs d’un éventuel retour ou d’une intervention stratégique dans le choix du candidat du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) persistent.

L’incertitude autour du choix du dauphin au sein du RHDP nourrit les spéculations. Plusieurs figures émergent comme prétendants potentiels, dont le vice Président Koné Meyliet et le ministre d'État Téné Birahima Ouattara, frère cadet du président. Cependant, les rivalités internes pourraient fragiliser la cohésion du parti et peser sur ses chances de succès.

Une opposition fragmentée mais déterminée

Face au RHDP, l’opposition cherche à s’organiser, bien que les divisions demeurent. Laurent Gbagbo, figure emblématique du Front Populaire Ivoirien (FPI) et acquitté par la Cour pénale internationale, conserve une influence considérable. Toutefois, son parti est affaibli par des querelles internes et des divergences stratégiques.

L’expérience de Tidjane Thiam sur la scène internationale pourrait s’avérer un atout décisif. Sa capacité à mobiliser des appuis économiques et diplomatiques pourrait renforcer le positionnement du PDCI. Toutefois, il devra veiller à ne pas être perçu comme un candidat imposé par l’extérieur, ce qui pourrait nuire à sa crédibilité auprès des Ivoiriens. Certains observateurs évoquent la possibilité d’une coalition entre l’opposition traditionnelle et des acteurs politiques émergents pour contrer le RHDP.

Les nouveaux acteurs : Une jeunesse en éveil

Parallèlement aux forces traditionnelles, une nouvelle génération de leaders, portée par la jeunesse ivoirienne, émerge dans le paysage politique. Ces figures, souvent issues de la société civile ou du secteur privé, incarnent un espoir de rupture avec les pratiques politiques jugées dépassées.

Les mouvements citoyens, galvanisés par les enjeux socio-économiques tels que le chômage des jeunes et l’inégalité, exercent une pression croissante pour exiger une transparence accrue et des réformes concrètes. Ce réveil citoyen pourrait jouer un rôle décisif en mobilisant des électeurs jusqu’alors désillusionnés.

Des défis économiques et sociaux lourds

L’économie ivoirienne, longtemps présentée comme l’un des moteurs de l’Afrique de l’Ouest, traverse une phase délicate. La baisse des cours des matières premières, notamment le cacao, combinée à l’inflation galopante, affecte le pouvoir d’achat des ménages.

Par ailleurs, les inégalités persistantes et les disparités régionales exacerbent les tensions sociales. Dans ce contexte, les candidats devront convaincre qu’ils disposent d’un programme crédible pour relever ces défis.

Un processus électoral sous surveillance

Les scrutins ivoiriens sont régulièrement marqués par des contestations et des violences post-électorales, comme en 2010, lorsque le pays a sombré dans une crise meurtrière. En 2025, la question de la transparence et de l’organisation des élections sera cruciale.

La Commission Électorale Indépendante (CEI) fait déjà l’objet de critiques concernant son impartialité. La participation des observateurs internationaux et la mise en place de mécanismes robustes de suivi électoral seront essentiels pour éviter les dérives et garantir des résultats acceptés par tous.

Un contexte régional et international complexe

La Côte d’Ivoire ne peut ignorer l’influence des dynamiques régionales dans ce processus électoral. La montée des souverainismes en Afrique de l’Ouest et la recrudescence des coups d’État dans les pays voisins, comme au Niger et au Gabon, ont ravivé les débats sur la stabilité des régimes démocratiques.

Sur le plan international, les relations avec la France, longtemps perçue comme un partenaire privilégié, sont de plus en plus contestées par une opinion publique en quête de souveraineté. Dans ce contexte, la capacité des candidats à proposer une vision claire des relations extérieures sera scrutée avec attention.

Les scénarios pour 2025

Alors que la Côte d’Ivoire se dirige vers l’échéance présidentielle, plusieurs scénarios se dessinent :

• La Continuité : Le RHDP parvient à maintenir son unité et à imposer un successeur crédible, assurant ainsi une transition relativement stable.
• Le Renouveau : Une coalition entre l’opposition et les forces émergentes réussit à mobiliser un large électorat, entraînant un changement de cap politique.
• Le Blocage : Des contestations électorales et des violences remettent en question la légitimité du processus et plongent le pays dans une nouvelle crise.

Un défi historique pour la nation

Plus qu’une simple élection, le scrutin de 2025 représente une opportunité historique pour la Côte d’Ivoire de consolider sa démocratie et de répondre aux aspirations de son peuple. Dans un contexte de défis multiples, les Ivoiriens attendent des candidats une vision claire, une intégrité exemplaire et un engagement sincère envers l’intérêt national.

Au-delà des querelles partisanes, c’est l’avenir même de la nation ivoirienne qui se joue dans cette élection aux multiples inconnues.

Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon