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RADIO TANKONNON

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Abidjan, carrefour historique d'une gouvernance pluriséculaire : décryptage des maires et gouverneurs d'hier et d'aujourd'hui

Publié par RADIO TAN KONNON sur 6 Février 2025, 09:33am

Catégories : #AFRIQUE

Abidjan, Côte d'Ivoire Dans le tumulte des débats contemporains, certains discours erronés circulent, affirmant, par exemple, que « depuis qu'Abidjan est Abidjan, ce sont les Atchan qui ont toujours été maires ». Or, une analyse minutieuse du parcours administratif et politique de la cité économique ivoirienne révèle une histoire bien plus nuancée et plurielle, illustrant la richesse de son héritage institutionnel. Avant d'envisager l'ère du District autonome d'Abidjan et la nomination du gouverneur par le chef de l'État, il convient de revenir sur la succession des maires qui ont façonné, depuis la création de la commune en 1956 jusqu'à la transformation de la structure administrative en 2001, le destin de la ville d'Abidjan.

Le Plateau, cœur économique et administratif d’Abidjan,
Le Plateau, cœur économique et administratif d’Abidjan,

I. Aux origines de la municipalité : l'avènement d'Abidjan en 1956

La naissance d'Abidjan en tant que commune fut proclamée en 1956, marquant ainsi le point de départ d'une ère nouvelle pour la ville. Le 18 novembre de cette année charnière, le premier conseil municipal fut élu dans un contexte historique particulier, sous l'égide de la loi-cadre de 1956. Ce fut à cette occasion que Félix Houphouët-Boigny, figure emblématique et futur architecte de l'indépendance ivoirienne, fut investi en qualité de premier maire. La vision de Houphouët-Boigny pour Abidjan se déclinait déjà dans des aspirations modernes et progressistes, un socle sur lequel la ville allait bâtir sa destinée politique et économique.

II. Une succession de dirigeants : les maires d'Abidjan avant 2001

Au fil des décennies, l'administration municipale d'Abidjan a connu une succession de dirigeants, chacun apportant sa contribution singulière à la structuration et au développement urbain de la cité. Après Houphouët-Boigny, la relève fut assurée par plusieurs personnalités politiques de premier plan, témoignant d'une dynamique de continuité et de renouveau.

Félix HOUPHOUËT-BOIGNY
Félix HOUPHOUËT-BOIGNY

Félix Houphouët-Boigny (1956-1960, PDCI-RDA)

Premier maire de la commune, Houphouët-Boigny incarne l'esprit d'une époque où la modernisation de l'administration publique se mêlait aux prémices de l'indépendance. Son mandat fut marqué par une volonté de structurer l'urbanisme d'Abidjan tout en jetant les bases d'une gouvernance démocratique naissante.

M. Jean-Claude Delafosse
M. Jean-Claude Delafosse

M. Jean-Claude Delafosse

Bien que moins médiatisé, le passage de Jean-Claude Delafosse dans la sphère municipale témoigne de la continuité de la gestion administrative, dans une période où les institutions locales commençaient à se stabiliser dans un contexte de mutation politique.

Jean Porquet (15 jours en 1960, PDCI-RDA)

Le bref mandat de Jean Porquet, limité à quinze jours, apparaît comme une parenthèse dans l'histoire de la commune. Ce passage éphémère laisse cependant une empreinte dans la chronique administrative, soulignant les turbulences de l'époque postcoloniale.

Antoine Konan Kanga
Antoine Konan Kanga

Antoine Konan Kanga (1960-1980, PDCI-RDA)

C'est sous le long mandat d'Antoine Konan Kanga, né le 20 mai 1917 à Kahankro, que la ville d'Abidjan vit s'installer durablement ses structures administratives. Durant ces deux décennies, la ville, en pleine mutation, bénéficia d'une gouvernance qui sut marier modernité et traditions locales, tout en faisant face aux défis inhérents à une urbanisation rapide.

Emmanuel Dioulo
Emmanuel Dioulo

Emmanuel Dioulo (1980-1985, PDCI-RDA)

Avec la transformation de la commune d'Abidjan en collectivité territoriale en 1980, la fonction de maire prit une nouvelle dimension. Emmanuel Dioulo, élu le 30 novembre 1980, se retrouva à la tête d'une ville en pleine restructuration. Son mandat fut consacré à la gestion d'un patrimoine urbain en expansion, où les enjeux de développement économique et social se faisaient de plus en plus pressants.

Ernest N'Koumo Mobio
Ernest N'Koumo Mobio

Ernest N'Koumo Mobio (1985-2001, PDCI-RDA)

Dernier maire avant la réorganisation institutionnelle de 2001, Ernest N'Koumo Mobio fut le témoin et acteur d'une période de transition décisive pour Abidjan. Son mandat vit la ville se transformer en une métropole moderne, mais aussi le début d'un processus qui conduirait à la fusion administrative de 2001.

Ces figures emblématiques, issues du paysage politique ivoirien et majoritairement affiliées au PDCI-RDA, témoignent de la complexité d'une gouvernance qui se devait de s'adapter aux changements socio-économiques et politiques de leur temps. Loin d'être l'apanage d'une élite unique, la succession des maires d'Abidjan révèle une pluralité d'acteurs, souvent issus de contextes différents, œuvrant pour le développement d'une ville en perpétuelle évolution.

III. La métamorphose administrative en 2001 : l'avènement du District autonome d'Abidjan

Le tournant majeur de l'administration abidjanaise survint en 2001, lorsque la Ville d'Abidjan, qui s'étendait alors sur 422 km² et regroupait dix communes, fut fusionnée avec les quatre sous-préfectures périphériques du département d'Abidjan. Cette opération aboutit à la création du District autonome d'Abidjan, une entité territoriale décentralisée s'étalant sur 2 119 km². Ce changement de paradigme institutionnel visait à renforcer la gouvernance et l'efficacité administrative dans une ville aux enjeux multiples, confrontée à une urbanisation galopante et à une complexification des problématiques locales.

Au sein de cette nouvelle structure, le gouverneur du district, désormais nommé par le Président de la République, se positionne comme le garant de la vision gouvernementale pour une ville ordonnée et moderne. Ainsi, depuis 2002, la fonction de maire cède sa place à celle d'un gouverneur, dont la responsabilité s'étend sur l'ensemble du territoire du district autonome.

IV. Les gouverneurs du District autonome d'Abidjan : portraits d'une gouvernance renouvelée

Depuis la fusion en 2001, la gouvernance d'Abidjan s'est articulée autour de la figure du gouverneur, investi d'une mission bien plus large que celle d'un simple maire. Cette fonction, désormais nominative, permet au Président de la République de placer à la tête du district celui qui incarne le mieux sa vision de développement et de discipline urbaine.

Pierre Djédji Amondji
Pierre Djédji Amondji

Pierre Djédji Amondji (2002-2011, FPI)

Nommé en septembre 2002 par le président Laurent Gbagbo, Pierre Djédji Amondji fut le premier à occuper ce poste transformateur. Son mandat s'inscrivit dans une logique de restructuration administrative et de modernisation des infrastructures urbaines, avec pour objectif de redonner à Abidjan sa place en tant que métropole dynamique et ordonnée. Ses réformes touchèrent divers secteurs, de l'urbanisme à la sécurité, contribuant ainsi à redéfinir le paysage abidjanais.

Robert Beugré Mambé
Robert Beugré Mambé

Robert Beugré Mambé (2011-2023, RHDP)

Succédant à Amondji, Robert Beugré Mambé, ingénieur de formation, présida sur une période marquée par des défis économiques et sociaux de grande ampleur. Sous sa houlette, le district autonome d'Abidjan vit la mise en œuvre de politiques visant à rationaliser la gestion des infrastructures et à instaurer un environnement urbain plus structuré. Sa vision, axée sur l'efficience administrative et la modernisation technologique, laissa une empreinte durable dans l'histoire récente de la ville.

Ibrahim Bacongo Cissé
Ibrahim Bacongo Cissé

Ibrahim Bacongo Cissé (depuis 2023, RHDP)

Plus récemment, en 2023, c'est Ibrahim Bacongo Cissé qui fut nommé à la tête du District autonome d'Abidjan. En tant que Ministre Gouverneur, Dr Cissé Ibrahima Bacongo incarne la volonté du Président de la République d'installer un leadership charismatique et visionnaire pour faire face aux défis contemporains. Sa nomination rappelle que, dans le choix du gouverneur, les critères de compétence, de charisme et d'adhésion à la vision gouvernementale priment sur toute appartenance ethnique ou locale. Ainsi, la fonction n'est pas l'apanage des Atchan, mais une position stratégique qui peut être occupée par tout individu partageant la vision et les ambitions de l'État pour une ville disciplinée et innovante.

La composition du conseil du district, aux côtés du gouverneur, vient compléter ce dispositif administratif. Ce conseil, véritable organe délibérant, est constitué pour un tiers de représentants des activités économiques, sociales, culturelles et scientifiques, et pour deux tiers de membres issus des conseils municipaux des communes composant le district. Cette structure garantit une représentation diversifiée et un dialogue constant entre les différents acteurs de la société abidjanaise.

V. Réflexions sur la gouvernance abidjanaise : entre héritage et modernité

L'évolution de la gestion administrative d'Abidjan, depuis l'époque des premiers maires jusqu'à l'ère contemporaine du District autonome, reflète une transition profonde dans la manière de concevoir la gouvernance urbaine. La transformation opérée en 2001 ne se résume pas à une simple modification territoriale, mais incarne une réponse aux enjeux d'urbanisation, de désordre et d'indiscipline qui caractérisent une métropole en constante mutation.

L'argument selon lequel « ce sont les Atchan qui ont toujours été maires » ne résiste plus à l'examen historique rigoureux. La diversité des acteurs qui se sont succédé à la tête de la ville d'Abidjan prouve que la gestion municipale a toujours été le fruit d'une confluence de talents et d'ambitions variées, transcendant toute affiliation ethnique. De même, la fonction de gouverneur, désormais nommée par le chef de l'État, rappelle que pour une ville aux défis multiples, il faut choisir un leader doté d'une vision claire et d'un charisme à la hauteur des responsabilités. C'est dans ce contexte que Dr Ibrahim Bacongo Cissé, en sa qualité de Ministre Gouverneur, incarne la continuité d'une gouvernance qui se veut à la fois moderne, inclusive et résolument tournée vers le développement.

Le parcours administratif d'Abidjan est donc une histoire de renouveaux et d'adaptations, où chaque étape a permis de préparer le terrain pour un futur urbain harmonieux. La fusion en 2001 et la nomination systématique du gouverneur illustrent la volonté de l'État de centraliser les décisions stratégiques tout en assurant une représentation équilibrée des intérêts locaux par le biais du conseil du district. Ce modèle, en constante évolution, s'inscrit dans une perspective de développement durable et de modernisation des institutions publiques.

VI. Conclusion : vers un Abidjan réinventé et rassembleur

L'analyse historique des maires d'Abidjan et la transition vers le District autonome offrent une perspective éclairée sur l'évolution de la gouvernance dans cette métropole emblématique de la Côte d'Ivoire. Si l'époque des maires fut marquée par une succession d'acteurs qui, chacun à leur manière, contribuèrent à l'édification de la ville, l'ère actuelle, avec la nomination du gouverneur par le Président de la République, témoigne d'une volonté d'instaurer une administration centralisée et visionnaire.

Abidjan, aujourd'hui, se présente comme un territoire où le pouvoir s'articule autour d'un gouverneur charismatique, dont la nomination repose sur des critères de compétence et de vision stratégique, indépendamment de toute appartenance ethnique. Ce choix, fondé sur l'exigence de discipline et d'efficacité, s'avère indispensable pour gérer une ville en perpétuel mouvement et aux ambitions multiples.

En définitive, l'histoire administrative d'Abidjan, de ses premiers maires à ses actuels gouverneurs, est celle d'une cité qui a su se réinventer au fil des décennies. Elle est le reflet d'une gouvernance dynamique, ancrée dans le passé tout en se projetant résolument vers l'avenir. C'est cette capacité d'adaptation et cette recherche constante de l'excellence qui continueront à guider Abidjan dans les défis du XXIᵉ siècle, faisant d'elle non seulement la vitrine économique de la Côte d'Ivoire, mais aussi un modèle de modernité et de cohésion sociale pour l'Afrique de demain.

Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon 

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