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Dans un communiqué publié le dimanche 16 février 2025, le ministère malien de la Sécurité et de la Protection civile a tenu à tempérer ces signalements en insistant sur la légitimité et la conformité du document aux normes internationales. Il rappelle ainsi que l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), les représentations diplomatiques étrangères et les missions consulaires accréditées au Mali ont été officiellement informées du lancement de ces passeports dès le 22 janvier 2025. Pour étayer son propos, il souligne que des spécimens physiques de ces nouveaux titres de voyage ont été transmis aux chancelleries concernées.
Malgré ces assurances officielles, la persistance de difficultés pour certains détenteurs de passeports AES soulève des interrogations. Le refus supposé par certaines ambassades de traiter ces documents met en lumière des enjeux diplomatiques sous-jacents, notamment dans le cadre des relations complexes entre l'AES et certains pays occidentaux.
Depuis son retrait officiel de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), le 29 janvier 2025, l’Alliance des États du Sahel, qui regroupe le Mali, le Burkina Faso et le Niger, entend affirmer sa souveraineté à travers des initiatives d’intégration régionale. La création d’un passeport commun, destiné à simplifier la circulation des citoyens au sein de cet espace confédéral, constitue une pierre angulaire de cette nouvelle architecture politique. Néanmoins, cette démarche ne va pas sans heurts, notamment auprès de certains partenaires internationaux qui, pour des raisons de politique étrangère ou de simple inertie administrative, pourraient mettre un certain temps avant de reconnaître officiellement ce document.
Conscient des défis que peut poser cette transition, le gouvernement malien assure poursuivre ses discussions avec les États concernés afin de lever toute ambiguïté. « Les interactions se poursuivent avec certains partenaires sur des questions spécifiques liées à leurs procédures internes et exigences particulières », souligne le communiqué du ministère de la Sécurité. Il enjoint par ailleurs les citoyens rencontrant des difficultés à se signaler auprès des services compétents afin que leurs cas puissent être traités dans le cadre des voies diplomatiques appropriées.
De son côté, le président de la Confédération de l’AES, le général Assimi Goïta, a tenu à réaffirmer son engagement à garantir la libre circulation des personnes et des biens au sein de l’espace sahélien, conformément à la feuille de route adoptée par l’Alliance. Cette promesse, si elle se heurte encore à certaines résistances, s’inscrit néanmoins dans une dynamique plus large de consolidation de l’union entre les trois États membres.
Au-delà de la question purement technique de la reconnaissance de ces passeports, cette situation met en exergue un rapport de force diplomatique plus profond. L’adoption d’un passeport commun par l’AES est perçue comme un symbole fort de rupture avec les institutions régionales traditionnelles telles que la Cédéao, ainsi qu’un pas de plus vers une autonomie renforcée vis-à-vis des anciennes puissances coloniales. En conséquence, le processus d’acceptation internationale de ce document pourrait être plus politique qu’administratif.
À cet égard, la position de la France, dont le consulat à Bamako est pointé du doigt par plusieurs usagers, sera scrutée avec attention. Une reconnaissance officielle de ces passeports par Paris constituerait un signal fort, tandis qu’un refus persistant pourrait être interprété comme une volonté d’entraver la dynamique d’émancipation portée par les autorités sahéliennes.
Dans les semaines à venir, l’évolution de cette affaire sera déterminante pour l’avenir du projet AES. La reconnaissance effective du passeport par l’ensemble des partenaires internationaux constituera une étape clé dans l’affirmation de cette alliance naissante. En attendant, les autorités maliennes affichent leur volonté de défendre la légitimité de ce document et d’aplanir les obstacles susceptibles d’entraver la mobilité de leurs citoyens.
Qu’il s’agisse d’un simple retard administratif ou d’un blocage politique plus profond, cette situation illustre les défis auxquels se heurte l’Alliance des États du Sahel dans sa quête de souveraineté et de reconnaissance internationale. Les prochains développements diront si cette initiative ambitieuse parviendra à s’imposer comme un véritable outil d’intégration régionale ou si elle se heurtera à des résistances qui en limiteront la portée.
Saidicus Leberger
Pour Radio Tankonnon