Peter Mutharika, 85 ans, reprend les rênes du Malawi : un retour inattendu au pouvoir dans un contexte de crise

Blantyre, 4 octobre 2025 — Sous les acclamations d’une foule en liesse réunie au stade Kamuzu, l’ancien chef de l’État Peter Mutharika a prêté serment samedi en tant que président du Malawi, signant ainsi un retour spectaculaire sur la scène politique à l’âge de 85 ans.

Peter Mutharika

L’ancien professeur de droit, qui avait déjà dirigé le pays de 2014 à 2020, retrouve la magistrature suprême après avoir remporté, le 16 septembre dernier, 56 % des suffrages, contre 33 % pour le président sortant Lazarus Chakwera. Une victoire nette qui marque la fin d’un cycle politique houleux et le début d’un nouveau chapitre pour cette nation d’Afrique australe.

La cérémonie d’investiture, sobre mais hautement symbolique, s’est déroulée en présence de milliers de partisans venus des quatre coins du pays. Les drapeaux rouges, verts et noirs du Malawi flottaient au rythme des chants et des danses, tandis que Mutharika, visiblement ému, jurait de « rendre au peuple sa dignité et son pain ».

Un retour après un revers historique

Peter Mutharika connaît bien les rouages du pouvoir. En 2020, il avait été contraint de quitter la présidence après que la Cour constitutionnelle a annulé sa réélection de 2019 pour irrégularités majeures — une première historique sur le continent. Sa défaite avait alors marqué l’avènement de Lazarus Chakwera, porté par l’espoir d’un renouveau démocratique.

Cinq ans plus tard, la roue tourne. Le mécontentement populaire face à la flambée des prix, aux pénuries de carburant et à la dégradation du niveau de vie a profondément affaibli le régime Chakwera, ouvrant la voie au retour du vieux routier politique.

Un pays à genoux

Dans son discours d’investiture, Mutharika n’a pas masqué la gravité de la situation :

« Le Malawi est en pleine crise. Il n’y a pas de nourriture, pas de devises étrangères, une pénurie de carburant et le coût de la vie est exorbitant. »

Il a déploré l’effondrement économique d’un pays déjà parmi les plus pauvres du continent, évoquant une « pauvreté extrême » et une « mauvaise gestion des ressources publiques ». Le Malawi, dont près de 80 % de la population dépend de l’agriculture, a été durement frappé par une succession de catastrophes naturelles — le cyclone Freddy en 2023, suivi d’une sécheresse l’an dernier — qui ont anéanti les récoltes et aggravé l’insécurité alimentaire.

Engagements et promesses

Mutharika, diplômé de l’université Yale et ancien professeur de droit international, a promis de lutter sans relâche contre la corruption, ce mal endémique qui gangrène les institutions malawiennes.

« Le gouvernement n’a pas d’argent, mais nous avons la volonté de reconstruire. Je ferai de la transparence la pierre angulaire de mon mandat », a-t-il déclaré, tout en rappelant que son propre nom avait été cité dans des scandales financiers lors de son précédent passage au pouvoir.

Le président a également lancé un appel appuyé à la communauté internationale :

« Le Malawi ne cherche pas des dons, mais des partenaires. Nous voulons bâtir une économie de production, pas de mendicité. »

Il a salué le soutien des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Union européenne dans la lutte anticorruption et annoncé l’envoi imminent d’une délégation à Washington pour renégocier l’aide américaine récemment réduite. Il a par ailleurs révélé avoir reçu un message de félicitations du président américain Donald Trump.

Une transition pacifique, mais distante

Lazarus Chakwera, battu dans les urnes, n’a pas assisté à la cérémonie d’investiture, mais son parti, le Malawi Congress Party, a adressé un message de félicitations au nouveau président. Ce geste, salué par les observateurs, marque une transition pacifique dans un climat politique encore fragile.

Une présidence à haut risque

À 85 ans, Peter Mutharika s’apprête à diriger un pays en crise profonde, où les attentes sociales sont immenses et la patience populaire limitée. Entre la pression économique, les défis climatiques et les accusations de corruption, l’ancien président devra prouver que son retour n’est pas un simple épisode de nostalgie politique, mais le début d’une reconstruction nationale.

Le Malawi, petit pays enclavé du sud-est de l’Afrique, joue désormais une partie décisive : celle de sa survie économique et de la crédibilité retrouvée de sa démocratie.

Saidicus Leberger
Pour Faso Patriotes Tv